Entre temps de travail et loisirs, nombreuses sont les personnes qui passent plus de huit heures par jour devant un écran. Pour limiter les risques sur notre santé, de bonnes pratiques sont recommandées.
L’informatique est omniprésente dans l’environnement de travail, et le temps que l’on passe devant un écran ne cesse d’augmenter. Dans le secteur tertiaire, beaucoup restent toute la journée assis devant un ordinateur et, une fois rentrés chez eux, certains s’y remettent, pour surfer sur le Net par exemple. Une telle pratique n’est pourtant pas anodine. Même s’il ne s’agit pas d’un risque immédiat, de mauvaises habitudes peuvent,
à la longue, générer des troubles de santé. Le travail sur écran « ne constitue pas un risque soumis à une surveillance médicale particulière, précise Marie-Anne Gautier, médecin du travail et expert d’assistance médicale à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), mais les deux principaux facteurs de risques associés au travail devant un écran sont les contraintes visuelles et celles sur l’appareil locomoteur ».
La sédentarité en cause
« Dans les métiers du BTP ou de la maintenance, les contraintes exercées sur le corps sont évidentes. Celui-ci est très sollicité et les postures sont souvent inconfortables et contraignantes, remarque Laurent Kerangueven, ergonome et expert d’assistance conseil en prévention à l’INRS. Lorsque l’on regarde travailler un salarié du secteur tertiaire, c’est beaucoup moins évident. »
Il met en garde contre les dangers de la sédentarité et préconise de « saisir la moindre occasion pour bouger de son poste, car la posture statique, contrairement à ce que l’on pourrait croire, est une source importante de troubles musculo-squelettiques (TMS) ».
Selon l’ergonome, un cercle vicieux risque de s’installer : « Quand une personne travaille huit heures par jour à son bureau pratiquement sans bouger, bien souvent, en fin de journée, elle conserve un comportement sédentaire. Le temps passé derrière un écran se prolonge une fois rentré à la maison, avec la télévision, le smartphone, la tablette… » De plus, les douleurs que l’on peut ressentir, liées à ce type de travail, incitent à faire le moins d’efforts possible.
Le haut du corps qui souffre
Il est fréquent que les personnes travaillant sur écran se plaignent de douleurs au dos, à l’épaule, au coude, au poignet ou à la nuque. Le poignet et les doigts, par exemple, sont sollicités de manière répétitive. « Les douleurs peuvent aussi être dues à la position de la souris, notamment quand cette dernière se situe trop loin du clavier : toutes les articulations du membre supérieur (épaule, coude, poignet) sont alors en dehors
de leur zone de confort », observe Laurent Kerangueven, qui conseille de rapprocher au maximum la souris du clavier.
Il est recommandé que la frappe soit effectuée le plus souvent avec les poignets « flottants », sans appui continuel sur la table. Les douleurs aux cervicales sont très fréquentes elles aussi, et pour les éviter, il faut placer le haut de l’écran au niveau des yeux.
Il convient de faire de même lors de l’utilisation prolongée d’un ordinateur portable, en le plaçant sur un support incliné.
Reposer ses yeux
Les yeux, fixés sur un écran en permanence, sont également très sollicités. « Tout dépend de la personne, nuance Marie-Anne Gautier.
Des troubles de la convergence peuvent se déclarer du fait de la fatigue des muscles oculomoteurs, aggravée par le travail sur écran. » « Il ne faut pas hésiter à consulter un ophtalmologiste si l’on ressent régulièrement des picotements des yeux ou des maux de tête, car ils peuvent être révélateurs de petits défauts de la vision », ajoute Laurent Kerangueven. « L’intensité du travail est plus en cause que l’écran lui-même »,
souligne Marie-Anne Gautier, qui recommande de « profiter d’un coup de téléphone, par exemple, pour quitter son écran des yeux et relâcher l’accommodation en regardant loin, sans chercher à fixer quelque chose ».
Les remèdes
Faire des pauses régulières est essentiel. « Selon les besoins, il est conseillé de s’arrêter, de se lever, de marcher pendant cinq minutes toutes les heures ou pendant un quart d’heure toutes les deux heures, indique-t-elle. Concernant l’écran lui-même, il y a un grand principe : il doit être perpendiculaire à la fenêtre afin que l’on ne soit pas ébloui et qu’il n’y ait pas de reflets ni de sources lumineuses dans l’axe direct du regard. » Il faut être attentif aux moindres signaux d’inconfort que le corps envoie, car « une petite douleur qui se manifeste une fois par semaine peut survenir de plus en plus souvent avec de plus en plus d’acuité et, pour les cas les plus graves, conduire à une perte de capacité fonctionnelle », alerte Laurent Kerangueven. Il n’y a pas d’aménagement idéal, mais certains points doivent être vérifiés : un siège mal réglé occasionnera des douleurs dorso-lombaires, un écran mal orienté fera souffrir les cervicales, etc. Le Code du travail précise d’ailleurs que l’employeur se doit d’informer et de former ses salariés sur les modalités d’utilisation de l’écran et de l’équipement de travail.
Déconnecter pour être moins stressé
On accuse aussi souvent le travail sur écran d’être un facteur de stress. Selon Marie-Anne Gautier, il n’en est pas le premier responsable, « c’est plutôt la nature de la tâche : certains postes cumulent plusieurs facteurs de risques psychosociaux, comme un travail très dense avec peu d’autonomie et pas de soutien de la hiérarchie ». Laurent Kerangueven convient néanmoins que « les NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la
communication, NDLR), en réduisant la frontière entre vie privée et vie professionnelle, peuvent contribuer au stress, car les gens consultent plus facilement leurs e-mails professionnels, par exemple, lorsqu’ils sont chez eux, restant ainsi constamment reliés à leur travail ».
Enfin, si le stress n’est pas une conséquence directe du travail sur écran, il peut avoir un impact indirect sur l’apparition de troubles musculo-squelettiques :
« Les personnes sont plus tendues, leurs muscles plus contractés, ce qui augmente la charge biomécanique des muscles et des tendons, explique Laurent Kerangueven.
De plus, le stress a pour effet d’entraîner la sécrétion de certaines hormones qui favorisent la survenue de TMS. »