Deux études, présentées lors du congrès de l’European Society of Cardiology (ESC), remettent en cause l’intérêt de l’aspirine dans la prévention primaire de l’infarctus du myocarde ou de l’accident vasculaire cérébral (AVC). Ce médicament, connu pour ses effets anti-inflammatoires et pour fluidifier le sang, n’aurait que peu d’effets bénéfiques. Pire, il augmenterait le risque hémorragique.
L’étude Aspirin to reduce risk of initial vascular events (Arrive), publiée dans The Lancet, a porté sur plus de 12 500 patients issus de sept pays. Agés de plus de 55 ans pour les hommes et de plus de 60 ans pour les femmes, ces derniers avaient tous un risque d’événement cardiovasculaire modéré (estimé entre 10 et 20 % à dix ans). Répartis en deux groupes, les uns ont reçu 100 mg d’aspirine en comprimé, tandis que les autres ont pris un placebo. Au bout de cinq ans, un événement cardiovasculaire (infarctus, angine de poitrine, AVC, accident ischémique transitoire – AIT –, décès cardiovasculaire) est survenu chez respectivement 4,3 % et 4,5 % des patients. En revanche, le risque de saignement digestif a doublé chez ceux qui prenaient la substance active par rapport au groupe témoin.
La seconde étude, intitulée Ascend, pour Acute study of clinical effectiveness of nesiritide in decompensated heart failure, a quant à elle été publiée dans le New England Journal of Medicine. Près de 15 500 diabétiques – une population qui affiche un risque cardiovasculaire élevé – ont là encore pris soit un comprimé de 100 mg d’aspirine par jour, soit un placebo. Après sept années de suivi, le taux d’infarctus, d’AVC, d’AIT ou de décès de cause vasculaire s’élevait à 8,5 % pour le premier groupe et à 9,6 % pour le deuxième. Ce léger effet positif est contrebalancé par des hémorragies graves (hémorragie intracrânienne, saignement oculaire à risque pour la vue, saignement digestif ou autre), plus fréquentes avec la prise du médicament.
Au vu de la balance bénéfice-risque défavorable, les auteurs des deux études ont conclu à l’inutilité de l’aspirine en prévention chez les personnes n’ayant jamais eu de pathologie cardiovasculaire. En revanche, celle-ci conserve tout son intérêt en prévention secondaire, c’est-à-dire chez ceux qui ont déjà connu un événement cardiovasculaire ou cérébrovasculaire.